ATTOM est un atelier partagé. Un lieu à la sémantique différente : on y parle d’équilibre, d’humanisme et de bon sens. Son « accoucheur », Adrien Lemardeley est un biochimiste qui, gamin, ambitionnait de confectionner un meuble à la fois esthétique et connecté. Cet homme n’est pas comme nous, son espace non plus.

Ça ne paye pas de mine : dans la zone artisanale de Vaise, avenue Joannès-Masset.
Pas de signalétique, un espace de 300 m² quelque peu défraîchi au bout d’une impasse, niché le long de la voie ferrée.

Depuis le 25 février 2016, Adrien Lemardeley y passe près de 70 heures par semaine : ici il est chez lui, ATTOM, acronyme phonétiquement pertinent pour Atelier traditionnel technologique ouvert et mutualisé. Car peu importe l’enveloppe, c’est le contenu qui compte.

Chez Adrien, 33 ans et globe-trotter patenté, humanisme, équilibre et spiritualité forment un triumvirat qui donne corps et sens à ses propos.

Un profil étonnant : fils de médecin militaire il passe six années de sa vie en Afrique de l’Ouest (au Cameroun notamment). Il rêve d’ébénisterie mais le soir, avant de s’endormir, ce sont des traités de médecine qu’il se plaît à dévorer. Pas commun. À la fac Catho de Lyon, Adrien obtient une licence de biologie et de biochimie.

Il s’imagine dans les traces de Pasteur porté par sa dimension paternaliste. Durant sept ans chez Aventis Pasteur, il fabrique des vaccins contre la polio, « et puis nous avons été rachetés : nous avons perdu notre âme. » Adrien a perdu la sienne en tous les cas. Au bout de trois ans, il décide de partir, sans même profiter du plan social. Nous sommes en juillet 2015. Seulement notre homme est un touche-à-tout, il s’ennuie vite sans stimulation intellectuelle. « Tatouage, électronique, impression 3D, etc. J’ai toujours eu pour habitude d’affleurer d’autres activités et d’autres univers en parallèle de mon travail. »

ATTOM est un projet nappé d’une imperméabilité que les artisans doivent s’approprier

Le voilà qui génère un site de mise en relations puis qui s’intéresse au Fab Lab¹.

Bilan ? « C’est formidable pour démocratiser l’approche conceptuelle mais il manque la dimension professionnelle. » Il la trouve à travers une annonce sur le Bon Coin [sic] : « Vous en avez marre d’être dans votre garage ? De subir les foudres de votre conjoint(e) ? Rencontrons-nous ! »

Résultat ? « Les artisans n’ont pas d’argent, pas de visibilité, pas de confort et un besoin prégnant d’espace. »

Adrien se lance, investit ses économies (35 000 €), trouve le local et s’emploie à créer un écosystème équilibré. Ils étaient cinq artisans mais deux sont partis : il reste une tapissière d’ameublement, un ébéniste luthier et un horloger. Tous sont rapporteurs d’affaires et invités à donner, chaque mois, dix heures de leur temps à la communauté. Pas banal non ? Quid d’ATTOM aujourd’hui ? « Nous sommes sur la fin d’une expérimentation puisque j’ai décidé d’ouvrir le capital d’ATTOM à cinq personnes sur des fonctions transversales avec pour dessein de structurer davantage notre business-model.

Notre ambition ? Incuber un Fab Lab au sein d’ATTOM afin d’en faire un vrai relais de croissance et pour identifier les éventuels futurs salariés de notre prébureau d’études qui s’emploiera à démontrer la faisabilité économique d’un projet. » En filigrane, la notion d’équilibre est toujours là : au niveau des associés, des éventuels futurs ateliers ATTOM sensés se gérer comme des SCOP et futur ATTOM qui se dessine : « Nous avons besoin de déménager, de doubler notre surface actuelle pour pouvoir accueillir, outre notre équipe, entre 15 et 20 artisans en atelier partagé. Nous cherchons sur Lyon intra-muros. Nous avons des pistes. Nous attendons… »

Dans dix ans Adrien se verrait bien travailler, chez lui, chez ATTOM, sur l’intégration de la biologie dans les systèmes électroniques. Il avoue une appétence de vie très forte aussi : at home on doit être bien…

 

¹Un Fab Lab (contraction de l’anglais fabrication laboratory, « laboratoire de fabrication ») est un lieu ouvert au public où il est mis à sa disposition toutes sortes d’outils, notamment des machines-outils pilotées par ordinateur, pour la conception et la réalisation d’objets.

Retrouvez cet article dans le magazine Rhône Métiers 382

Site internet d'ATTOM


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